Comment écrire une scène d’action?

Une scène d’action est une scène dans laquelle un personnage prend ou est obligé de prendre une décision qui entraîne un bouleversement dans le récit : une farce, un duel, une trahison, une déclaration d’amour, la découverte d’une relique sans prix, etc. Une scène d’action se déroule généralement en trois étapes :

1. La préparation

C’est l’étape où on construit le suspens. C’est le calme avant la tempête, on sent que la situation va basculer d’un instant à l’autre. La tension monte petit à petit, de même que l’insécurité, la crainte de l’échec et les attentes du lecteur.

 

Bien obligé, je me lève et je cours jusqu’à l’enclos pendant que les autres restent planqués à l’abri. C’est chaque fois la même chose, c’est toujours à moi de faire le sale boulot.
Je trouve que je suis allé assez loin comme ça. Je me retourne vers les autres qui rigolent comme des soupières. Williams me fait des grands signes énervés pour que je continue. Alors je me glisse sous la barrière, mais c’est pas commode parce qu’il n’y a pas beaucoup de place. J’arrive à me décoincer. J’avance à demi-courbé pour ne pas me faire voir. Technique sioux. Je m’approche doucement de la fenêtre. Ma tête arrive juste à la bonne hauteur pour regarder à l’intérieur.
Et je vois.
La sorcière de Midi, Michel Honaker, Rageot éditeur

On alterne de brèves descriptions (qui ralentissent le rythme de la narration et prolongent le suspense) et des actions (qui agissent comme accélérateur). Les détails physiques servent à nous familiariser avec le cadre, mais ce sont surtout les gestes et les pensées du personnage qui bâtissent l’ambiance. On le suit pas à pas, tous les sens en éveil, dans l’attente que l’action se déclenche.

 

2. Le développement

Le compte à rebours commence, tout se précipite et le héros doit agir, bon gré mal gré :

Je me mets à courir comme un fou. Mais je suis trop loin encore. Bien trop loin. La vieille se penche au-dessus d’Harold. Elle lève déjà son affreux tranchoir. Il brille au soleil comme un trait de feu. Harold est perdu. Je me jette sur elle de toutes mes forces. Elle tombe sur le côté. Je suis gros et quand je fonce tête baissée, ça compte. Je la vois qui ouvre des grands yeux terribles. Elle se relève, avec son hachoir. Je sais que tout est fini, qu’elle ne va faire de moi qu’une bouchée.
Mais juste à ce moment, il y a un coup de tonnerre.
[…] pousse un cri. Une pierre se détache sous elle. On dirait qu’elle cherche quelque chose. Elle tend une main pour m’agripper.
La sorcière de Midi, Michel Honaker, Rageot éditeur

Une scène d’action est un moment privilégié entre le personnage et son lecteur.  C’est un moment d’émotion intense où leurs liens se renforcent, mais aussi un moment de vérité puisque c’est au coeur du danger que la véritable nature du héros se révèle. Il doit alors faire preuve d’originalité, de courage, d’intelligence et éventuellement d’aptitudes physiques, bref, il doit être à la hauteur des attentes du lecteur.

Comme dans la préparation, la chorégraphie et les pensées des personnages sont essentielles. On fait appel aux sens du lecteur dans les descriptions, et dans les actions on privilégie les verbes et les noms, car plus précis et plus efficaces. Les événements défilent à toute allure, donc les phrases sont courtes et les dialogues sont rares, brefs et directs, pour évoquer l’urgence et le danger.

Deux pièges à éviter dans les scènes d’action: tout d’abord, il y a les détails inutiles qui ralentissent le rythme, diminuent la tension et distraient le lecteur. Ensuite, la durée. Une scène d’action trop longue, trop lente ou bien au contraire trop chargée en rebondissements peut lasser le lecteur. Solution, on coupe, on condense, on simplifie. Ou bien on inclut des pauses, des moments qui atténuent la tension et qui permettent au lecteur de souffler un peu : une aide fortuite, un méchant temporairement assommé, un héros qui trouve une cachette provisoire.

3. L’issue

Si on croque dans les scènes d’action à belles dents, on est aussi content de savourer le retour au calme :

Nous restâmes étendus ainsi sur la rive pendant un temps que je n’aurais su mesurer. Seule ma poitrine se soulevait et s’abaissait tandis que j’aspirais l’air à grand bruit. […] Peu à peu, sa main gauche se desserra, libérant ma cheville. Sa main droite lâcha le bâton. Elle glissa lentement sur la pente humide et s’enfonça dans l’eau presque sans une éclaboussure. Je ne compris pas ce qui s’était passé ; en tout cas, elle était morte. De ça, j’étais sûr.
Je la regardai flotter dans le courant.
Un tourbillon l’emporta au milieu de la rivière. La lune éclaira une dernière fois son visage, puis elle sombra.
L’apprenti épouvanteur, Joseph Delaney, Bayard Jeunesse

Cette étape décrit l’état des personnages une fois le danger passé. C’est un moment de relâchement qui met en valeur le dénouement de l’action ainsi que le mérite des personnages. Le rythme ralentit, les phrases sont donc plus longues et les descriptions plus nombreuses.

Pour des idées sur comment planifier les scènes d’action de votre histoire, je vous donne rendez-vous sur le billet Comment ajouter de l’action dans une histoire pour enfants.

 

Et maintenant, l’épineuse question des groupes d’âge

Épineuse, car les goûts et le niveau de lecture varient énormément d’un enfant à un autre. Épineuse aussi parce qu’avec tous les accros de littérature jeunesse de 30 ans et plus, les statistiques sont bousillées en partant 😉

Mais on peut y aller avec quelques tendances :

  • le niveau de violence : on retrouve peu de violence physique dans les premiers romans, les conflits étant plutôt d’ordre verbal ou psychologique : une dispute, une séparation, un deuil, un petit chat perdu
  • les méchants : plus les lecteurs grandissent, plus les antagonistes sont intelligents, fâchés et créatifs dans leurs méfaits (et pour les plus vieux, il y a le méchant des méchants : le méchant autrefois gentil qui a basculé dans l’ombre suite à un sacrifice, une souffrance, une faiblesse…)
  • le suspense : on ne fait pas trop peur aux tout petits (en tout cas, pas trop longtemps).
  • le rythme : s’il faut penser à ménager la sensibilité des plus petits, il ne faut pas non plus oublier leur capacité de concentration.  Plus les lecteurs sont jeunes, plus il faut éviter les longueurs et les détails superflus : des phrases courtes, des situations claires, des actions brèves et des descriptions rapides à assimiler pour s’assurer de garder leur attention et leur intérêt pour l’histoire.

Si vous voulez vous attarder plus sur les différents groupes d’âges des lecteurs, je vous invite à lire Écrire pour les enfants: comment choisir ses lecteurs?

Crédit image: freepik.com

Laisser un commentaire